Le sport - Le Grand Prix cycliste

1956C'était Jour de fête hier à La Machine, dans la cité nivernaise du charbon, et abandonnant pour quelques heures seulement leurs outils de travail, les mineurs se sont retrouvés en foule au sein de la localité, heureux de vivre sous un soleil devenu enfin un véritable soleil d'été et de vacances.

D'un côté, les flonflons de la fête foraine s'évadaient dans un ciel limpide, seuls quelques vaporeux anneaux blancs dessinés par des appareils à réaction s'en venaient rompre l'azur infini.

D'un autre côté, tout au long d'un ruban goudronné d'une longueur de 3 kms 800 environ, une double haie de toilettes claires, vives et légères prenait vie et vibrait intensément au passage d'un peloton bariolé avec lequel le soleil, toujours lui, jouait harmonieusement avec les couleurs et l'éclat du métal.

Ainsi situé, ce grand prix cycliste de La Machine, organisé de main de maitre par le comité des fêtes (M. Vingdiolet en tête), avec l'appui financier de la municipalité, des commerçants de la ville et de l'Union Fraternelle Machinoise, sous le contrôle exemplaire du Vélo-Club Decizois (M, Bouchenez et ses amis collaborateurs) et, patronné par « le Journal du Centre », ce Grand Prix cycliste donc ne pouvait connaitre que le succès.

Vingt et un concurrents, et non des moindres, puisque l'on relevait dans la liste des engagés des noms tels que Fayon, Brunel, Rémond, Blard, Cieleska, et autres Fradin, Gondoux, Choulat, etc... se sont présentés sur la ligne de départ aux ordres de M. Martin, adjoint au maire, chargé de l'agréable tâche d'abaisser le fanion du départ.

Dès les premiers coups de pédales, l'allure est rapide. Las. il faudra, pour beaucoup, déchanter bien vite. En effet, le circuit qui s'offre pour la première fois cette année aux coureurs s'avère extrêmement difficultueux. Les « bosses » se succèdent, les virages sont fréquents (et quels virages ! en particulier ceux de la route de Bussière et de la route de Thianges !) et, sur une chaussée en bon état dans l'ensemble, ce circuit s'annonce « facile » pour les échappées individuelles.

Le premier tour n'est pas entièrement parcouru que, déjà, quatre hommes s'accrochent et font une culbute impressionnante : Plumecoq (V.S.N.) doit abandonner ; Chaumereuil (C.C. Charitois) repart attardé.

Mais, bien vite, du peloton surgissent les habitués qui mènent un train rapide. Tour à tour, Blard, Choulat, Coupé, Gondoux, Brunel, Gruber, Fradin apparaissent aux premières places. Il faudra néanmoins attendre le quatrième tour pour voir Blard (A.S.P T.T. Nevers) s'éloigner progressivement du gros de la troupe.

De 100 mètres, l'écart augmente et se convertit en dizaines de secondes, puis en minutes. Au douzième tour, la différence atteint plus de deux minutes sur un peloton, duquel se sont enfin détachés trois volontaires : Coupé (V.S.N.), Choulat (Auxerre), et Finet (Châteauneuf-sur-Loire) qui eux ne sont bientôt plus qu'à 50 secondes du nivernais solitaire. La ronde-poursuite se continue jusqu'au quinzième tour.

A cet instant, le postier "craque" et cède le commandement à ses trois valeureux poursuivants. Deux tours plus tard, d'ailleurs, Blard rejoint à l'hôtel un lot de coureurs épuisés tant par la chaleur et par la dureté du parcours que par la fatigue qui s'avère excessive pour certains participants aux trop nombreuses courses de ces derniers jours.

A dix tours de la fin, la situation s'est éclaircie et nous notons : Choulat, Coupé et Finet, suivis à une minute par un quatuor : Rémond, Fayon, Berger et Pué. Puis viennent, à deux minutes trente, Cieleska qui a brisé son frein arrière, et Gruber. Doublés, ou sur le point de l'être, on rencontre enfin Chapelle, Glatigny et Chaumereuil qui fait preuve d'une ténacité remarquable.

La fin de la course est poignante et les coureurs demeurant en présence, portent sur leur visage les traces d'une fatigue sérieuse. Finet et Coupé réussissent à décramponner Choulat. Fayon abandonne, puis Coupé doit se résoudre à laisser Finet partir seul vers la victoire. Quatre tours avant la fin, Pué de son côté lâche Rémond et Berger et passe même devant Coupé.

Un par un, les arrivants coupent la ligne sous les applaudissements d'un public record, fort bien contenu par un service d'ordre assuré par les gendarmes et les pompiers de La Machine, tandis que le micro égrène les ultimes primes qui se totalisent par un chiffre fort coquet.

Podium

Armand Finet

Yves Choulat

Jean Pué