L'édito de René Vingdiolet, Maire de La Machine
Une année de travail
L'année 1985 se termine, elle laissera le souvenir d'un été ensoleillé. Ceci a permis aux entreprises qui ont en charge les travaux de la ville de respecter les délais qui leur sont imposés. De vastes chantiers, voilà de quoi a été fait la vie de notre cité cette année.
Déjà la perception rénovée et agrandie est ouverte au public. Les agents du Trésor ne s'en plaignent pas. L'accueil, grâce aux travaux, mais aussi à leur sourire et leur gentillesse y est agréable.
Les sapeurs-pompiers ont emménagé dans leurs nouveaux locaux. Le service est devenu là aussi plus agréable, et plus facile.
Chef-lieu de canton, possédant l'infrastructure nécessaire ; La Machine peut prétendre à devenir Centre de Secours , nous y pensons, ceci renforcerait encore l'efficacité de nos soldats du feu.
La ville leur a donné le logement ; le département ne leur refusera certainement pas les équipements.
La mairie, nouvelle formule, sera terminée vers la fin mars, déjà les services techniques ont pris possession de leurs bureaux définitifs.
La loi de décentralisation a donné de nouvelles responsabilités aux communes, pour les assumer, cela suppose des moyens. Une mairie plus grande, mieux aménagée, permettant un meilleur accueil du public, un classement d'archives plus facile c'est ce qui sortira des travaux entrepris.
Aux Glénons, le centre aéré va lui aussi bon train, locaux rénovés avec en plus un nouveau bâtiment, le tout avec le chaud aspect du bois, voilà ce qui accueillera nos jeunes en 1986.
Les adjoints traiteront dans les pages qui suivent les aménagements en cours avec un peu plus de détail, rien cependant en remplace une visite, c'est pourquoi nous avons décidé en bureau municipal une journée porte ouverte à chaque ouverture. La première a été pour la perception le 6 décembre dernier et les jours suivants.
Chers concitoyens, la fin de l'année précède les voeux.
Au nom du conseil municipal, je vous présente ceux de vos élus. Que 1986 soit pour tous une année meilleure. A ceux qui souffrent, aux familles dans l'épreuve, je veux dire qu'ils trouveront toujours auprès de nous le soutien que nous pouvons leur apporter, même si ce soutien est modeste, il sera toujours le résultat de la plus large compréhension.
Les entrailles de la terre - Les Mineurs de La Machine
La richesse d'un pays, d'une localité est avant tout le travail de ses hommes. Ce sont les mineurs qui ont fait LA MACHINE. Nous avons eu l'occasion de dire que le Musée de la Mine, ce doit être aussi celui des mineurs, c'est à dire retraçant leurs peines, leurs luttes, leurs joies.
Au cours de la séance du 15 juillet 1985, le conseil municipal a voté le principe d'une subvention à un ou plusieurs étudiants afin de réaliser un mémoire ou une maîtrise sur notre histoire locale. Voici extrait d'une brochure avec l'aimable autorisation de l'auteur, une page de notre histoire locale.
André Lavergne.
"Il y a deux mille chrétiens qui habitent de pauvres cabanes et qui vont chercher dans les entrailles de la terre leur pain de chaque jour".
C'est en ces termes que le Curé Dany présente ses paroissiens de La Machine dans un appel à la charité publique. Nous sommes en 1837 et depuis fort longtemps une population paysanne autant qu'ouvrière vit auprès de la grande "machine" qui a donné son nom à ce hameau de Thianges. Dans le même temps, on aménage les chemins. A Decize, on crée un véritable port qui s'appellera d'ailleurs "La Charbonnière"
L'essor des houillères, se poursuit au 19ème siècle. Cette période sera marquée par la forte personnalité d'un enfant du pays, Jean-Baptiste Machecourt. Fils de mineur, devenu ingénieur, il dirigera l'exploitation pendant près de 40 ans et la mairie pendant 20 ans.
En 1864, la Compagnie Schneider achète la houillère et instaure à La Machine un règne absolu qui durera jusqu'aux nationalisations de 1946.
Farouche, mais peu organisé : tel apparaît le peuple des mineurs. La plupart sont des manoeuvres saisonniers, Louis Lanoizelée note à leur propos "Les paysans, où se recrutaient les mineurs, et qui étaient la classe la plus nombreuse en ce temps, participaient aux grands faits historiques avec leur peine, leur misère et leur sang, mais sans en connaître les buts qui, trop souvent, allaient à l'encontre de leur propre bonheur". (La Machine et sa houillère p. 66)
Le danger permanent, la peine au travail, donnaient aux mineurs une certaine résignation. La misère et la famine pouvaient les amener à des colères terribles. La première éclata en 1840. Le récit qu'en fit le curé Dany, dans sa chronique paroissiale, mérite d'être cité dans son intégralité.
"En 1840, une insurection éclata parmi les ouvriers. Quelques mineurs, revenus de St-Etienne, avaient préché à leurs camarades le bénéfice de la révolte. La souffrance qui pesait sur une grande partie de la classe ouvrière, à raison du prix élevé des grains, fit goûter naturellement leur parole. Le 11 mai, le mécontentement fit explosion.
L'ingénieur Machecourt fut accablé de réclamations menaçantes ; le contrôleur qui voulut lui porter secours fut maltraité. Les vitres de son bureau furent brisées. Seule la présence de M. Schaërff, directeur, et la promesse de leur procurer des grains, calmèrent pour un instant les esprits
Mais dans la soirée, l'apparition des gendarmes réveilla le feu mal éteint. On sonne le tocsin au clocher, on bat "aux champs" avec le tambour de la commune et le tumulte recommence.
La nouvelle se répandit qu'il y avait à Decize d'immenses greniers bien fournis des grains que les propriétaires n'envoyaient pas au marché pour en entretenir des prix élevés et que des bateaux de grains destinés à l'étranger stationnaient sur le Canal.
Le 12 mai, dès le grand matin, le tocsin et le tambour appelaient les insurgés aux armes. A eux se joignit toute la population de La Machine, qui se porta, hommes, femmes et enfants, sur Decize, tambour en tête, pour aller forcer, disait-on, les accapareurs de grains. Sur le chemin, ils rencontrèrent les ouvriers de la Charbonnière qui firent bande avec eux. (...)
Un moment, on craignit un engagement (avec les Dragons) dont les suites eussent été funestes. M. Schaërff, qui les avait rejoints, promit de livrer des grains à 2 frs le myriagramme. Ils finirent par rentrer petit à petit dans l'ordre (...). Les plus compromis en furent quitte pour quelques temps de prison".
Les mineurs se mirent à nouveau en colère lors du coup d'état du 2 décembre 1851. Là encore, nous citons la chronique du curé Dany.
"Dès le mois d'août 1851, sous la pression des socialistes et des communistes, une partie des esprits de notre population commençait à s'agiter sérieusement. On se parlait tout bas. On s'affiliait aux sociétés secrètes dans lesquelles on prêtait, sous le poignard et en face du Christ, les surments les plus terribles. Les réunions se tenaient dans les bois.
Le 29 octobre arrivèrent 600 chasseurs ayant à leur tête le général Pellion et le préfet Petit de la Fosse. A leur départ fut organisé... une compagnie de pompiers pour protéger l'ordre en cas d'émeute.
Le samedi 6 décembre, à la suite du coup d'état, une foule se réunit sur la place en face de l'église. Ils se portèrent sur Nevers au secours de leurs frères et amis qui s'y rendaient des divers points du département. Le cortège fut dissipé aux environs de St-E1oi.
Suite à ces évènements, soixante environ furent arrêtés ici comme ayant participé aux conspirations des sociétés secrètes. Douze d'entre eux ont été, après jugement, transportés en Afrique et 34 internés en France. Dans le même temps, une compagnie de 200 soldats venus de Nevers procédèrent au désarmement général du pays".
A la fin du siècle, l'agitation ouvrière prend le relais des émeutes politiques. Déjà en 1887, la concurrence étrangère, l'écoulement difficile du charbon a amené la Compagnie Schneider à licencier 60 mineurs. En 1888, les bureaux de l'Administration sont envahis à plusieurs reprises. On compte jusqu'à 400 manifestants réclamant du travail. Bientôt, une pétition circule en triple exemplaire pour alerter les pouvoirs publics et réclamer le droit au travail. La pétition est couverte de 113 signatures. Une fois encore, les responsables sont arrêtés et emprisonnés quelques mois.
(à suivre)
"Extrait de la plaquette "Aux origines du Mouvement Ouvrier en Nivernais" souvenirs rassemblés par Maurice JOINET et édités par les Mouvements d'Action Catholique A.C.O. et J.O.C"
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